Vendredi 8 juin 2012, 14h15
Hôtel Drouot, Paris
Deux pièces exceptionnelles seront proposées parmi d’autres dans la prochaine vente Haute époque du 8 juin chez Piasa. Tout d’abord, une grande gourde de pèlerin en verre bleu dans une monture en cuivre doré. La taille de cette « fi asca da pellegrino », haute de plus de 47 cm, en fait l’objet de ce type le plus important parvenu jusqu’à nous.
Réalisée à Murano, la bouteille est en verre d’un bleu de cobalt intense et est insérée dans une monture ouvragée en cuivre doré qui porte sur chaque face un médaillon fi gurant le lion de saint Marc. Cette monture, véritable travail d’orfèvre, est fi nement ajourée et gravée de rinceaux de pampres couvrant le corps, le col et le piédouche. Sur les épaules, deux mufl es de lion ciselés en haut relief retiennent un anneau de la chaînette aujourd’hui disparue. Au centre de chaque face, un médaillon en émail champlevé bleu moyen et turquoise reproduit le lion de saint Marc « in moleca », symbole de la Sérénissime.
Réalisée à la fi n du XV siècle ou durant le premier tiers du XVI siècle, cette gourde de pèlerin est donc la plus ancienne en verre avec monture en cuivre doré connue. À la croisée de l’Orient et de l’Occident, cette « fi asca » est un objet emblématique des traditions des formes ainsi que de la transmission des savoirs et des techniques dans le monde méditerranéen, tous ces caractères en font un objet unique, en outre dans un état de conservation remarquable. (60 000 / 80 000 €)
Tout aussi rare, mais à l’opposé sur le plan esthétique, une Sedes Sepientae en pierre sculptée en ronde-bosse est impressionnante par la puissance spirituelle qui s’en dégage. Massive, tenant et protégeant l’Enfant assis contre elle de ses deux grandes mains, elle fascine par l’impassibilité de son regard d’une fi xité intemporelle. Provenant d’une église du Sud de la France, elle s’apparente à certaines sculptures catalanes et se place dans la suite des œuvres du Maître Cabestany durant le XIII siècle. L’aspect particulièrement primitif de cette sculpture romane pourrait séduire des collectionneurs au-delà de l’habituelle clientèle de la Haute époque. (65 000 / 80 000 €).
Une dizaine de sculptures appartenant à une collection de Marseille, réunies dans les années 1960 auprès des meilleures galeries parisiennes, seront également proposées à la vente. Parmi elles, une rare petite Vierge à l’Enfant assise en noyer polychromé et doré de la région de Cologne. Tôt en époque, de la première moitié du XV siècle, elle appartient à la production aimable et raffi née de la vallée du Rhin (10 000 / 15 000 €).
Un groupe de retable représentant la Mise au tombeau animé de nombreux personnages illustre la qualité de ciseau des ateliers des Pays-Bas méridionaux, vraisemblablement bruxellois dans les années 1500 (7 000 / 10 000 €). Une rare représentation de saint Martin en buis sculpté, Allemagne, vers 1530, montre aussi un autre aspect de cette collection par son originalité (6 000 / 8 000 €).
Enfi n un coff ret recouvert, à l’extérieur comme à l’intérieur, de gravures sur bois illustrant des scènes courtoises et profanes semble être le seul connu à ce jour. En eff et, les exemples de coff rets montrant l’usage de bois gravés sont ceux dits de messager qui renferment une seule estampe, de thème religieux, à l’intérieur de leurs couvercles. Celui-ci de la même époque, c’est à dire de la fi n du XV siècle, avec ces scènes de banquet et de mariage, était vraisemblablement destiné à un présent nuptial. Réchappé d’un incendie dans un château de la région de Mâcon, il porte en plus sous sa serrure le nom de Pierre Boyart en lettres gothiques, nom qui pourrait évoquer un célèbre chevalier ayant combattu dans les guerres d’Italie en cette fi n du Moyen-Âge… (12 000 / 15 000 €).
Laurence Fligny
Expert